Deux nouveaux articles issus d’ITK dans Annals of Botany !
Imaginez-vous être un jeune plant de blé, vos racines bien ancrées dans le sol. Vous voyez des taches de septoriose se développer sur vos premières feuilles, celles qui sont les plus proches du sol. Horreur ! Votre épi se dresse sur votre tête ! Vous pensez être condamné à pourrir dans d’atroces souffrances car vous ne pouvez pas prendre vos talles à votre collet ? Erreur ! Terminez votre croissance, il vous reste peut-être encore une chance.
Serait-il possible qu’une plante échappe à la maladie au cours de sa croissance ? La façon dont pousse une plante peut-elle influencer sa sensibilité à une maladie donnée ? L’agent pathogène sera-t-il favorisé ou défavorisé si la plante grandit vite, si elle s’allonge beaucoup ou si elle produit de grandes feuilles ?
C’est pour répondre à ce type de questions que j’ai mené mes travaux de thèse de 2012 à 2015 sous l’encadrement conjoint d’ITK, de l’INRA (UMR EcoSys) et de l’INRIA (Equipe Virtual Plants). J’aurais alors pu me lancer dans de grandes expérimentations pour faire pousser des plantes aux croissances variées, les inoculer de parasites et les mesurer régulièrement sous tous les angles. Mais j’ai choisi une approche complémentaire : la modélisation.
Simuler la croissance des plantes et le développement des maladies permet de tester des hypothèses sur leurs interactions multiples et complexes, et donc parfois difficiles à aborder directement dans des expérimentations au champ. La modélisation des pathosystèmes permet également de mettre en lumière les facteurs qui influencent le plus les épidémies et de révéler des possibilités de régulation. La recherche de méthodes de modélisation innovante est à la base du cœur de métier d’ITK. Elle permet une amélioration continue de nos outils, en particulier ceux pour la gestion de la protection des cultures.
Durant ma thèse, j’ai développé des modèles de champignons pathogènes des cultures en interaction avec des modèles de croissance de plante en 3 dimensions. Cela m’a permis d’analyser finement ces interactions et d’explorer leur dynamique dans des conditions variées. Je me suis surtout intéressé à 3 cas d’étude : l’oïdium de la vigne, la septoriose du blé et la rouille brune du blé.
Figure 1 : Profils de dispersion en 3D simulés dans des couverts de blé.
Récemment, deux chapitres de ma thèse ont été valorisés sous forme d’articles dans la revue scientifique Annals of Botany :
– Le premier présente le modèle de septoriose du blé. Il étudie comment la croissance du couvert de blé, son organisation spatiale et la mort des feuilles influencent les épidémies. La septoriose est causée par un champignon qui vient du sol et se propage de feuille en feuille dans les éclaboussures de pluie. Grâce à des simulations du modèle, nous avons confirmé qu’il existe une course entre la croissance de la plante qui développe de nouvelles feuilles puis les éloigne et la maladie qui se disperse vers le haut du couvert au grès des évènements pluvieux. Les résultats du modèle indiquent aussi que la durée de vie des feuilles module le délai dont bénéficie le parasite pour puiser les ressources de son hôte et se reproduire.
– Le second présente un modèle couplé de septoriose et de rouille sur du blé. Tandis que beaucoup de modèles existants s’intéressent aux interactions entre un seul agent pathogène et son hôte, nous présentons ici un modèle original d’interactions entre plusieurs types de champignons et leur hôte. C’était à la fois un défi conceptuel et technique, et un premier pas vers de futures études qui viseront à comprendre quelles conditions environnementales et quels types de couverts végétaux favorisent une maladie plutôt qu’une autre.
Pour ITK Lab,
Guillaume Garin, avec l’aide de Vianney Houlès